Aimer sans attendre que l'autre nous répare

Aimer sans attendre que l'autre nous répare

Et si aimer, c'était pouvoir être là, sans s'oublier, et croire que l'autre saura se relever — à son rythme ?
Un amour qui soutient sans sauver, qui accompagne sans s'épuiser.

Il y a parfois, au creux de nous, une attente silencieuse.
Un espoir discret, mais tenace : que l'amour nous répare.
Qu'il recolle ce qui a été brisé. Qu'il nous rende entiers, enfin.
Comme si la rencontre d'un autre pouvait effacer la solitude ancienne, les manques accumulés, les blessures d'avant.

Dans ma boutique, j'ai vu passer de nombreuses personnes.
Des femmes, des hommes, souvent marqués par l'espoir d'un amour qui ferait office de baume.
Pas toujours conscient, mais perceptible.
Un regard, un mot, parfois même une bougie choisie comme si elle allait, par magie, guérir quelque chose de plus profond.

Mais aimer n'est pas réparer.
Et personne ne peut guérir à notre place ce que nous refusons encore de rencontrer en nous-mêmes.

Lorsque nous attendons de l'autre qu'il comble nos failles, nous ne lui offrons plus notre amour, mais notre manque.
Et sans le vouloir, nous lui confions une mission impossible : nous sauver.

Cette attente peut devenir une prison.
D'abord douce, presque romantique — "grâce à toi, je vais mieux."
Puis de plus en plus lourde.
Car si l'autre échoue à nous apaiser, nous lui en voulons.
Et s'il y parvient un instant, nous devenons dépendants, incapables d'exister sans lui.

La dépendance affective n'est pas un excès d'amour — c'est un vide que l'on demande à l'autre de remplir, encore et encore.
Un vide qui ne connaît pas de fin, et qui consume autant qu'il attache.

Mais cette dynamique n'est pas à sens unique.
Car si certain·es attendent inconsciemment d'être réparé·es, d'autres endossent avec ferveur le rôle de celui ou celle qui va réparer.
Et ces deux postures peuvent parfois se rencontrer… ou se heurter.
Car vouloir sauver quelqu'un qui ne demande rien, c'est aussi projeter un manque, une peur, un besoin de contrôle ou d'utilité.

Se glisser dans la peau du "sauveur" peut sembler noble… au début.
On veut aider, soutenir, réparer même.
On donne tout, parfois sans compter, en pensant bien faire.
Mais peu à peu, vient l'épuisement. Puis l'incompréhension : "Pourquoi ne se relève-t-il pas ? Pourquoi malgré tout ce que je donne, rien ne change ?"

Et parfois, on oublie ceci :
L'autre ne nous a rien demandé.
Il ne s'est pas présenté comme une plaie à panser, mais comme une personne, entière dans son incomplétude, forte malgré les fissures.
Et c'est peut-être justement cela qui nous a touchés.
Cette fragilité visible, cette lumière qui s'échappait des brèches.
Les fêlés laissent passer la lumière, dit-on. Et c'est vrai.
Ce sont ces cœurs cabossés qui souvent vibrent le plus fort, car ils savent ce que c'est que tomber… et se relever, encore.
Alors pourquoi vouloir effacer ce qui, peut-être, nous a aimanté ?

Aimer n'est pas réparer.
C'est honorer le chemin de l'autre, même s'il est sinueux.
C'est croire en sa force sans la précipiter.
Et ne pas s'approprier sa douleur pour s'en faire le héros.

L'autre ne peut pas nous sauver.
Et nous ne sommes pas responsables de sa reconstruction.
Mais cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas être là.

On peut marcher à ses côtés.
Offrir notre présence, notre main, notre lumière.
Mais sans nous confondre avec une béquille.
Sans croire que notre amour suffira à effacer ses douleurs.
Et surtout, sans s'oublier en chemin.

L'amour peut porter un instant.
Il peut réconforter, entourer, adoucir.
Mais il ne remplace jamais le travail intérieur.

C'est un amour comme un feu de camp.
On s'y approche quand le vent devient froid.
On s'y réchauffe, on s'y raconte.
Mais personne ne s'y consume.
Personne ne s'y sacrifie.

C'est un amour debout.
Un amour lucide, qui sait que chacun porte ses blessures.
Et qui fait confiance : l'autre saura se relever. Peut-être lentement. Peut-être autrement. Mais à sa manière.

Et surtout, c'est un amour possible.
Un amour profond, vrai, beau.
Deux âmes conscientes de leur fragilité, qui choisissent de s'aimer non pas pour se réparer, mais pour se reconnaître, se soutenir, se célébrer.

Parce qu'un cœur abîmé peut aimer.
Et qu'un amour conscient ne cherche pas à réparer — il choisit d'aimer quand même.
Et c'est peut-être cela, le plus grand des miracles.

Pour aller plus loin… tout en douceur

Et si, ce soir, tu t'accordais un moment pour te poser avec cette question :
"Qu'est-ce que j'attends de l'amour ?"
Non pour te juger, mais pour écouter.
Écouter ce que ton cœur cherche, espère, redoute parfois.
Et peut-être, en silence, lui murmurer que tu es là. Que tu t'engages à ne plus te quitter, à ne plus tout remettre dans les mains de l'autre.

Tu peux aussi allumer une bougie, écrire quelques mots à ton toi intérieur :
Une promesse de tendresse. Un acte de présence.
Comme une manière de dire : je ne te laisserai plus chercher un sauveur — car je suis là, et je t'aime.

Avec toute ma tendresse pour celles et ceux qui marchent le cœur ouvert et les mains tendues, Vicky

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